Die Deutschen – Lektion 1 : « Frau Neumann ist in der Küche. Der Hund heißt Bello. Ursula hat einen Papagei ».

Ceux qui ont tenté d’apprendre l’Allemand au collège dans les années 80-90 s’en souviennent peut-être. Nous l’avions tous les deux choisi en LV1 et pensions que tout s’était évaporé. Mais après quelques jours en immersion les souvenirs refont surface et on se prend même à bredouiller quelques phrases intelligibles à la boulangerie ou au restaurant. Willie, Andrea, et leurs deux filles, chez qui nous passons deux nuits à Chur, y ont grandement contribué, malgré leur fort accent Suisse-Allemand. A coup de discussions multilingues, de parties de memory ou de uno enchaînées sans répit avec les filles, la langue de Goethe s’exhume (un peu) comme par magie du fond de nos cortex. (Enfin, surtout celui de Jérôme!).

Après cette journée de repos « en famille » nous reprenons notre route en remontant le cours du Rhin « postérieur » (une des deux branches qui forment Le Rhin à partir de Tamins) dans une météo toujours imprévisible. La véloroute des Grisons devient rapidement un enchantement : de longs passages de pistes en forêt, puis une ascension sans trafic (l’autoroute parallèle et ses tunnels aspirent par chance voitures et camions en transit), les gorges de la Viamala, les villages de Zills et d’Andeer sous le soleil, pour aboutir à Splügen, petit bijou perché à 1.500 m sur la route de l’Italie.

Nous y laissons la route du col de San Bernardino et bifurquons vers le sud pour les 12 km et +700 m d’ascension finale du col de Splügen. Des séries de lacets qui s’enchevêtrent au long de la pente, des restes des neiges de l’hiver, un ciel chargé mais lumineux, et même quelques flocons au passage du col, ingrédients du spectacle grandiose que nous offre la montagne. Et nous, grains de sables sur nos frêles montures au milieu de cette puissance. Quelle sensation !

L’Italie nous accueille alors. 42km et -1.800m de descente jusqu’à Chiavenna. En plongeant par une route virevoltante du côté ensoleillé des Alpes, tout change en quelques tours de roues : maisons en pierre sèches et lauzes, végétation luxuriante (c’est bon de voir du vert!), terrasses animées et joyeuses…de l’influence du climat sur la vie des hommes.

Contrepartie de la griserie de cette dégringolade effrénée : le sentiment de gaspiller comme des paniers percés l’énergie potentielle accumulée avec obstination à la montée. Après Chiavenna, tout sera à refaire pour se hisser à la Maloja !

Notre (très) bref interlude italien aura duré le temps d’un déjeuner au soleil, au pays de la bresaola. 12km après Chiavenna, en remontant la vallée de la Bregaglia, nous retrouvons la Suisse. Le superbe camping de Vicosoprano, outre son écrin de verdure cerné de montagnes, propose, comme tous les campings suisses qui nous ont accueillis, les équipements indispensables au confort des voyageurs par mauvais temps. Des sanitaires chauffés (et impeccables), des tables et un coin pour cuisiner abrités sous un préau (certains possèdent même des salles communes). Parfait pour enchainer les soirées pluvieuses sans souffrir. 

Encore quelques efforts, quelques rampes, quelques lacets, et les 1.815 m du col de la Maloja nous ouvrent les portes de la haute Engadine sous une pluie glaciale. Ici naît l’Inn qui se jettera dans le Danube 500 km plus loin.

Le décor fascinant, malgré la timidité du soleil et l’austérité ambiante (on est très “hors saison”), d’une des plus hautes vallées habitées d’Europe nous captive : lacs, sommets enneigés, forêts, prairies, villages où le temps semble s’être arrêté. La véloroute des Grisons y est une merveille. Sur près de 140 km elle nous prend par la main, des rives de l’Inn aux hameaux perchés, sur 90% de voies cyclables sans voitures, dont une bonne part sur des pistes ou chemins forestiers. Sérénité et impression de randonner en montagne, un vrai plaisir !

Atterrissage final de cet itinéraire à Landeck (déjà l’Autriche), d’où nous rallions Innsbruck via l’étape « qui ne sert à rien » : 80 km de plat entre l’Inn, l’autoroute, et la voie ferrée, le tout sous la pluie, mais heureusement à 100% sur piste cyclable. Nous la croquons d’une seule traite dans la matinée à 25km/h en nous relayant face au vent, et nous installons au sec dans un appartement cosy pour quelques jours de tourisme urbain.

Nous plaçons d’ores et déjà cette traversée des Grisons parmi nos très jolies pérégrinations cyclotouristiques (qu’est-ce que ça doit être par beau temps !) en songeant aux clichés sur la Suisse et les Suisses : ponctualité, propreté, citoyenneté, fromage, chocolat, paysages,… tout était au rendez-vous. Tout comme la rigueur, et une certaine austérité Suisse-allemande. Cela dit, quel plaisir de laisser son vélo non attaché sans appréhension, de voir que tout est entretenu, fonctionnel (pas un village sans WC publics d’une propreté impeccable !), et d’admirer les villages soignés aux fermes en bois et aux maisons peintes.