Vélos chargés, pneus et pilotes gonflés à bloc, blog relooké (merci Matt), nous fermons la maison ce 12 avril, et en jetons symboliquement la clef pour entamer quelques mois de vie nomade. 

Six ans après notre aventure andine, avides de revivre ces heures intenses, qui aiguisent nos sens, nous confrontent aux éléments et suscitent de multiples rencontres, nous reprenons la route. En démarrant de chez nous cette fois, pour mieux se sentir partir, se détacher du quotidien avec douceur, plutôt que d’être parachutés par avion en un clin d’œil à l’autre bout du monde. Cap à l’est, vers les monts du Caucase et la Géorgie d’où nous avons l’intention de revenir tranquillement par la terre (en bateau et en train), lorsque l’hiver se mettra en travers de notre route. 

Nous traversons Versailles sous un froid soleil chahuté par le vent du nord, le cœur partagé entre l’excitation du départ et les émotions liées aux premiers aurevoirs et aux épisodes familiaux de ces derniers jours. 

Nos routes familières du dimanche matin, une première étape chez les parents de Céline, un café chez son frère, la forêt de Fontainebleau, nous mènent chez la maman de Jérôme pour un  joyeux pique-nique campagnard de départ. En ce dimanche 16 avril, nombreux ont répondu présent à notre invitation. Quel bonheur de voir ceux que l’on aime réunis avant de partir pour quelques mois. Les enfants s’éclatent dans le jardin à la recherche des œufs de Pâques pendant que nous nous régalons de mots affectueux et de chaleur humaine. 

“On ne dit jamais assez, aux gens qu’on aime, par peur de les gêner, qu’on les aime ». Les mots de Louis Chédid nous permettent de leur témoigner notre affection en chanson. Merci à Thierry pour le renfort à la guitare !

Mardi 18 avril, la Bourgogne nous tend les bras pour rejoindre Dijon via le Morvan.

Le printemps se fait attendre. Températures fraiches, soleil timide, feuilles et bourgeons dans les starting blocks. Heureusement le colza ne se laisse pas intimider par les ciels chargés, et illumine la campagne de sa robe jaune (RAL1021 pour les connaisseurs) jusqu’à Vézelay.

La colline éternelle nous ouvre alors les portes du Morvan. Un océan vert de forêts et de prairies, dont la houle des petites routes aux rampes hachées et pentues donnent du fil à retordre à nos cuisses de cyclo-voyageurs chargés. 1500m de dénivelé positif entre Vézelay et le lac des Settons : une bonne mise en jambes pour les étapes alpines !

Au sud du massif, nous franchissons nos premiers cols. Avec ses 719m, celui de la Croix de la Chèvre nous gratifie du point routier le plus haut de Côte d’Or. Celui de la Croix d’Allye, nous exfiltre du massif par son flanc sud-est pour rejoindre les bocages du charolais, la plaine, et filer jusqu’à Beaune.

A peine quelques jours de balade, et déjà la magie du vélo comme « machine à rencontrer » opère. A Auxerre, Dominique et Jacques, cyclotouristes aguerris, nous laissent nous installer dans leur maison alors qu’ils ne sont pas encore rentrés, et nous offrent le gîte et le couvert comme à des amis de longue date. A Mailly le Château, un couple d’anglais qui retapent leur maison, nous proposent un café servi sur la magnifique terrasse qui domine la vallée de l’Yonne. A Dijon, Margaux et Hugo, jeune couple de voyageurs à vélo, nous accueillent comme de bons potes malgré notre différence d’âge, partagent leur pizzeria préférée, et nous guident pour une visite vélo nocturne et pluvieuse de la vieille ville. C’est toujours le même bonheur de partager des moments aussi chaleureux et désintéressés qu’éphémères. On se raconte nos voyages, nos vies, on échafaude un monde idéal…

De Beaune à Dijon, la route égrène ses petits villages cossus à la renommée internationale : Pommard, Aloxe-Corton, Nuits-Saint-Georges, Vosne-Romanée, Chambolle-Musigny, Gevrey-Chambertain. Tout ça dans un mouchoir de poche.  Au passage, le petit bourg de Reulle-Vergy nous cueille par surprise avec son exposition « Arts à la Grange » qui réunit le superbe travail d’artistes féminines et bourguignonnes dans une présentation digne d’une galerie new-yorkaise. On serait bien reparti avec quelques pièces pour notre chez nous.

Ce dimanche matin, le ciel a bien du mal à se débarrasser de l’humidité de la veille. Nous quittons Dijon dans la brouillasse pour une étape de liaison vers la Franche-Comté où nous prévoyons de passer quelques jours chez la cousine de Céline avant de passer en Suisse. Le camping de Ranchot sur les rives du Doubs est heureusement pourvu d’un grand préau qui nous abrite des averses orageuses de la fin de journée.

Après la visite des salines royales d’Arc et Senans (dédicace spéciale à la famille Pannetier), et une nuit au bord de la Loue chez Florence et Luc, nous achevons l’étape « française » de notre périple sous la pluie mêlée de grêle. Par 5°C, nous débarquons pour déjeuner chez Stéphanie et Sébastien, trempés et transis. Heureusement, au menu ce midi, juste après une bonne douche chaude : saucisse de Morteau, pommes de terre sautées et comté. Miam !

Nous laissons nos ailes mécaniques au repos quelques jours. Pour prendre le temps, profiter des moments ensemble et s’immerger tranquillement dans notre voyage…